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Former les seniors pour les maintenir en emploi

Syntec Conseil-Recrutement- 02/07/2021

Lors d’une intervention, à l’occasion des 24èmes journées du Longitudinal (Cereq-Lest-Université de Marseille), deux économistes, Jean-Marie Dubois et Christine Fournier, ont présenté une étude sur la formation des seniors. Bien que datant de 2018, la plupart des enseignements de cette étude restent aujourd’hui encore d’actualité.

Les seniors accèdent moins souvent à la formation

Lors d’une intervention, à l’occasion des 24èmes journées du Longitudinal (Cereq-Lest-Université de Marseille), deux économistes, Jean-Marie Dubois et Christine Fournier, ont présenté une étude sur la formation des seniors. Bien que datant de 2018, la plupart des enseignements de cette étude restent aujourd’hui encore d’actualité. En effet, le taux d’accès des seniors à la formation est significativement inférieur à celui des autres générations. Cette situation est, d’une part, révélatrice du modèle social français qui met surtout l’accent sur la formation initiale. Il apparaît, d’autre part, que les seniors « accèdent moins que leurs cadets à la formation et, quand ils y accèdent, ils suivent des formations dont les profils ne semblent pas toujours répondre aux menaces qui pèsent sur leurs emplois ».

L’étude part du constat que l’allongement de la vie active et la révolution digitale nécessitent l’actualisation des compétences au-delà de 50 ans. Même si la formation ne constitue pas la panacée, plusieurs expériences, notamment dans les pays du nord de l’Europe, montrent que la formation contribue au maintien des seniors en emploi. La formation est donc souvent mise en avant comme un bon moyen d’enrayer la dégradation du maintien des seniors en emploi. Or, force est de constater qu’ils se forment moins que les plus jeunes.

Les 3 raisons qui écartent les seniors de la formation : refus des employeurs, inadéquation, absence de motivation

Trois raisons principales à cet état de fait sont identifiées par l’étude. La première tient au refus des employeurs de financer et/ou d’accorder le temps nécessaire à la formation demandée. En effet, le processus de demande de formation relève « de pratiques et de règles explicites ou tacites, intériorisées par les salariés ». Quand bien même ils ne demandent pas explicitement de formation, les seniors anticipent un refus de la part de leur employeur. Les motifs de refus tels que « l’entreprise a refusé l’absence » et « le financement a été refusé » sont plus souvent mis en avant par les plus âgés, l’employeur pouvant estimer peu rentable d’investir en formation pour un salarié plus proche de la retraite.

Autre raison majeure, il apparait qu’il existe un écart entre les attentes des seniors et l’offre de formation. L’étude met en évidence que le motif de l’inadéquation des contenus représente 14 % des raisons invoquées par les plus de 50 ans (contre 10 % en moyenne). Si on élargit la question à l’ensemble des formations disponibles (demandées ou pas), ce sont plus de 50% des seniors qui évoquent cette raison pour ne pas suivre de formation (contre 30% parmi les autres tranches d’âge). Indirectement, ce constat identifie un axe de progrès concernant le contenu des formations qui devrait être adapté en fonction de l’expérience et des compétences développées par les participants.

La troisième grande raison est propre aux seniors eux-mêmes et à leurs motivations. En effet, un tiers seulement des salariés âgés de 50 ans et plus déclarent souhaiter prendre davantage de responsabilités (contre 71 % des moins de 30 ans) et la moitié d’entre eux déclarent souhaiter faire évoluer le contenu de leur activité (contre 78 % des 30-39 ans). Ce moindre intérêt laisse penser que les seniors perçoivent peu l’utilité de la formation, au vu de faibles perspectives d’évolution professionnelle. Peut-être y-a-t-il également chez eux la croyance naïve que leur expérience suffit à garantir leur qualification. Quelle qu’en soit la motivation, nombre de seniors n’envisagent pas la formation comme nécessaire à leur emploi.

La plupart des seniors ne semblent pas voir dans la formation un moyen d’assurer leur maintien en emploi. Ainsi, parmi les ouvriers, les seniors déclarent majoritairement suivre des formations imposées (84 % contre 64 % en moyenne). Un nombre important d’entre eux étant tenu d’actualiser leurs qualifications (par exemple les électriciens ou les soudeurs) ou de suivre des formations « Hygiène et Sécurité ». A contrario, quel que soit leur âge, plus des 80% des salariés formés déclarent que ce qu’ils ont appris lors d’une formation pourrait leur être utile pour exercer le même métier, confirmant qu’ils ont tout intérêt de se former afin d’être plus efficaces dans leur travail.

Les conditions pour favoriser la formation des seniors

Si l’on accepte l’idée que la formation constitue un bon moyen pour améliorer la situation professionnelle des seniors et leur maintien en emploi, un travail d’information devrait être réalisé en amont afin de diffuser l’idée que la formation permet d’échapper à la déqualification et au chômage qui en résulte, notamment auprès des moins qualifiés. Ce qui suppose également que les employeurs jouent le jeu et que, au quotidien, ils encouragent les projets individuels de formation au lieu de les bloquer. En effet, différentes études montrent que c’est bien avant le seuil des 50 ans que les programmes de formation doivent être engagés, notamment pour les salariés les moins qualifiés. « Les exemples des pays d’Europe du Nord tendent à montrer que la formation est d’autant plus efficace pour maintenir les seniors en emploi qu’elle s’inscrit dans une politique générale de l’entreprise soucieuse de garder les salariés plus âgés ».

Les dernières réformes de la formation professionnelle, intervenues en 2014 et 2018, visent à concentrer les fonds de la formation sur les publics qui en ont le plus besoin. En ce sens, elles créent un nouveau cadre dont devraient théoriquement bénéficier les seniors dont à peine un tiers est encore en emploi au moment de l’âge de départ en retraite. Seule l’épreuve des faits permettra cependant de vérifier dans le temps l’efficacité de ces nouveaux dispositifs. En effet, « les réticences des employeurs ou la définition de l’offre de formation sont les principaux éléments qui peuvent freiner la formation des seniors ». Par ailleurs, la récente crise sanitaire avec l’explosion du télétravail vient également modifier la donne. L’accélération des mutations qu’elle a provoquée risque d’agir comme un révélateur peu favorable aux moins qualifiés. Sans qu’il ait été possible de mettre en place des formations, les salariés ayant dû en quelques jours apprendre à maîtriser les technologies leur permettant de travailler à distance. Cette situation risque d’être particulièrement défavorable aux seniors les moins préparés à une telle évolution.

Source : Intervention aux 24èmes journées du Longitudinal (Cereq-Lest-Université de Marseille), Jean-Marie Dubois, Christine Fournier

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